Le lac Pacifique

Vendredi 17 mai – JOUR 8. Une semaine que nous sommes en mer. La traversée ressemble maintenant au paradis qu’on ose à peine imaginer. L’océan est plat! Un vrai lac cristallin, d’un bleu profond à tendance timidement tropical. Les nuages blancs se dentellent vers le ciel et s’aplatissent à l’horizon, comme des boules de coton. Ils forment une couronne autour de nous, mais au zénith le soleil règne en maître absolu. À son contact prolongé, ma peau commence à dorer. Quand la brise s’intensifie, le lac Pacifique s’orne de rides qui lui donnent un aspect gaufré. Nous naviguons comme sur une seule longue et interminable vague plate qui se répète à l’infini et déforme l’horizon. L’eau a l’air parfaitement transparente, mais il n’y a rien à voir, à part entre 1000 et 3000 mètres de profondeur. Quelques cailloux flottent à la surface, habités par divers coquillages. On dirait des pierres-ponces ultra légères. Des poissons volants apparaissent de temps en temps. Fascinante créature que le poisson volant! Deux ont échoué sur le bateau. On les a retrouvés complètement asséchés, prêts à servir d’appât sur nos fils de pêche précaires.

Si le décor est d’une beauté à couper le souffle, le vent, lui, nous fait défaut. On ne peut se permettre de couper le moteur, et notre vitesse reste en dessous de la moyenne de saison, risquant de rallonger la traversée d’un jour. Les réserves d’eau et de gaz ne posent pas (encore) problème, mais peut-être faudra-t-il commencer à être prudent quant aux rations de nourriture.
Nos journées sont remplies de farniente et dolce vita. Bons repas (pain perdu, scones au fromage, chili con carne…) lecture, bronzette, vaisselles à l’eau de mer et sieste. Le plus beau, c’est que ce ne sont pas des vacances.
Selon mes calculs, nous avons parcouru environ 670 milles et il nous reste 505 milles jusqu’à Vava’u. Nous sommes à 102 milles de Minerva Sud et à 124 milles de Minerva Nord, ce qui veut dire qu’à notre rythme actuel (105 milles/jour), on atteindra Minerva Sud dans un peu moins de 24h. Mais je pense que nous devons réajuster notre course, car notre direction actuelle (25°) nous ferait passer à plus de 90 milles à l’ouest du récif de Minerva. Je pense donc que Ross va recalibrer la course pas loin des 40°. Après vérification sur les outils électroniques, j’ai eu la confirmation que mes calculs étaient bons, sauf pour la direction, qui suivant une déclinaison, reste à 25°.
Minuit. Je prends mon shift, la nuit est calme et sombre. J’hésite entre lire et admirer les étoiles : celles du ciel comme celles du lac-océan, bien que les planctons fluorescents se fassent un peu plus rare ce soir.






ENGLISH corner : read Stephane’s contribution
On day 8 of our mirthful passage, we find ourselves savoring this cruise in new glassy conditions. We watch movies and enjoy the life of bliss, vicariously living the high life on a yacht bound for paradise. We take some time off in between shifts to have an enriching linguistic exchange of Maori and French. Darren, Sandie and I pick each other’s brains and we learn to discover this unique culture and language that has cradled our lives in New Zealand as we sail further from it, expanding our experience during our nikio temoana – ocean journey.

To be perfectly honest, I’m also fighting boredom. There isn’t much to do, but the boat displays an array of possibilities for languor: we sleep – a lot – we eat – quite a bit – we talk – as much as we can bare – and we celebrate – as much as we should. We still attempt to accessories our meals with the ocean’s offerings, but it isn’t feeling generous these days. The glassy ocean is literally the calm after the storm, we’re pushing a steady average of 5 knots and the hum of the engine has grafted itself into our subconscious.
The anticipation of hitting up Minerva Reef is quite real though. This unique opportunity stems from the precedent inauspicious events of this rough vacation. The storm and the rescue were a blessing in disguise – oh, now you tell me! I guess it’s the serendipity of it all. We won’t be stopping by the South Minerva Reef due to the sketchy pass permitting entry only within the right tides. We’ll circumvent its outer wall trolling instead. Minerva’s northern reef, a few hours further, is nearly a perfect circle with a well-defined entry point that we can handle. Getting shipwrecked now is not an option. It’s not our boat, we’re not supposed to anchor but we’re going to offer ourselves this awesome chance nonetheless.
Until then we will still be surrounded by a lot of nothingness. The only risk we’ve faced for the past 2 days is colliding with another vessel, which would be catastrophic, but we’d have to try in these conditions. In the open ocean there a certain sense of solitude, but by some peculiar occurrence, at this instant, it doesn’t feel vast and we don’t feel lost, we feel like we are exactly where we’re supposed to be. We couldn’t be anywhere else.
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