Ca fait quelques temps déjà que Natalia et moi évoquions l’envie d’aller à Haridwar, et Gautam nous avait répondu qu’il y avait de la famille. Nous avons donc convenu d’y passer le week-end.
Le bus, qui aurait dû durer un peu moins de 2 heures, a mis plus de 3h30 (après tout je ne sais même pas pourquoi je le mentionne !) Vers 23h, Gautam nous indique que sa tante habite à 30 minutes (1h30 donc) et il s’aperçoit que ça fait peut-être un peu loin. Quelques coups de fil plus tard, il est convenu que nous logions dans une autre branche de sa « famille ». Le terme famille étant exagérément étendu ici (il englobe tout un tas de personnes qui ne sont techniquement pas de la famille) impossible de savoir chez qui nous serons. Ce n’est pas faute d’avoir essayé de lever le mystère, mais quand on lui demande si c’est une autre tante, Gautam répond « on peut dire ça oui »…d’accord. Tout comme pour son âge ou les dates en général, savoir qui est »génétiquement » de sa famille n’a pas l’air crucial.
Cette tante-là donc, il la connait pour l’avoir rencontré à Dhampur, mais il n’est jamais allé chez elle. V’la aut’chose ! Après avoir déambulé une bonne demi-heure, nous sonnons à une porte. Contre toute attente, c’est un étranger qui pointe le bout de son nez au balcon. Il nous toise d’un air suspicieux, et je le comprends. Que font deux blanches et un indien à cette heure dans un quartier résidentiel ? On essaye de lui expliquer qu’on cherche la famille de notre ami, ce qui le rend encore plus méfiant. « Ne devrait-il pas savoir où ils habitent, si c’est sa famille ? » Oui mais, on est en Inde, et c’est Gautam !
Vers minuit et demi on pose enfin nos sacs chez la tante. Elle nous sert le chaï et les biscuits comme s’il était 4h de l’après-midi. Plusieurs membres de la famille (ça inclut peut-être les voisins, les amis, le chauffeur…) se joignent à nous, apparemment trop curieux pour attendre le lendemain. Natalia et moi sommes exténuées, mais ça n’a pas l’air de les déranger. On grignote en silence, puisque après tout, pas besoin de parler, on peut se regarder, c’est déjà tellement fascinant ! De toute façon entre notre hindi et leur anglais…la communication est limitée.
On espère que nos bâillements à répétition vont faire passer le message, mais non. On commence donc à se préparer…je m’éclipse pour enfiler mon pyjama et me brosser les dents, Natalia transfère les coussins d’un canapé à l’autre…Quand je reviens la smala est toujours installée dans la pièce qui va nous servir de chambre. Aïe, comment dit-on « dodo » chez eux ?? Une fois le lit déplié, la tante et sa fille sont toujours là, assises au bord lit ! Il a fallu qu’on se glisse sous les draps pour qu’enfin elles acceptent de nous laisser dormir. Je savais que la notion d’espace n’était pas la même, mais rien de tel qu’une petite mise en condition pour s’imprégner du concept !
Le réveil sonne à 8 heures, dans l’espoir de profiter de la journée. C’est sans compter que la tante insiste pour nous servir le petit déjeuner, certes délicieux, mais à 10h30 ! Je sais, quand on est chez les gens, on s’adapte, mais je ne suis pas très à l’aise parce que mon ami Franck, le réalisateur de « Around Canada » avec qui j’ai travaillé à Montréal, nous attend à son hôtel. Il commence son tour du monde par l’Inde et a fait 6 heures de bus pour qu’on se retrouve à Haridwar.
Deux « cousines » de Gautam (pour autant on ne sait pas vraiment si ce sont les filles de la « tante ») nous servent de guide tout au long de la journée. Au programme, visite de temples, balade sur les quais du Gange, bain (juste les pieds pour moi). La rivière à cet endroit est encore relativement propre, elle coule tout droit de l’Himalaya (non pas que ce soit déterminant pour les indiens).
En cette période de Kumb Mela, Haridwar rappelle vaguement Las Vegas sans les casinos (mais avec les lumières), et Disneyland sans les manèges (mais avec les files d’attente). La Kumb Mela est le plus gros rassemblement religieux au monde. Elle a lieu tous les 12 ans (chanceuse!) et dure un peu plus d’un mois. Le soir nous avons donc assisté au rituel que viennent accomplir des milliers de pèlerins, à savoir allumer une bougie que l’on dépose sur la surface du Gange. On est resté quelques temps assis à contempler le spectacle des flammes qui vacillent au gré des flots.
J’ai deux manières de réagir à une atmosphère embarrassante. Soit ça me pèse, je suis grincheuse et ça se voit, soit je fais le clown. Sans que je puisse vraiment contrôler quelle réaction je vais avoir, elles se font pratiquement tout le temps dans cet ordre. Après avoir été passablement énervée par le comportement de notre famille d’accueil, je suis passée en mode clown au dîner. Ça a détendu l’atmosphère, et quand à 2 heures du matin ils me demandaient encore des pitreries, j’ai préféré en rire.
Le lendemain nous parvenons à décoller tôt, malgré un au-revoir charmant mais interminable sur le pas de la porte. On rejoint Rishikesh dans la matinée, et à peine sortie du bus je préfère déjà cette ville à Haridwar. C’est touristique, mais on comprend pourquoi. Ici tout est plus paisible, même le Gange semble couler un peu moins vite. Pour l’anecdote, Rishikesh est devenu la capitale mondiale du yoga depuis que les Beatles y ont fait un séjour en ashram en 1960. Nous on se contentera de faire une belle randonnée avec chutes et bains d’eau et de soleil à la clé.J’en profite aussi pour acheter des bracelets de cheville, histoire de compléter ma panoplie de la parfaite hippie. J’ai résisté à l’envie de me (re)percer le nez, mais j’ai toujours des mèches rose-rouge en souvenir de Holi.
Le retour sur Dhampur est interminable, à cause de la Kumb Mela il y a un trafic monstre et notre bus est plein à craquer. Mais comme souvent, ces détails sont insignifiants comparé au plaisir de la découverte.
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